MONTAIGNE (3) : « DES CANNIBALES »

On lira « Des Cannibales » ensemble (p. 108-123) et on passera une partie du cours au MOA. Travail de préparation :

• retrouver le lexique du « barbare / sauvage », du « naturel », et du « civilisé » : quelles sont les valeurs et les associations de ces idées ?
• quand vous pensez au « cannibalisme », que veut dire ce mot et quelles sont ses associations pour vous ?
• le ton de Montaigne : essayez de trouver (au moins) un exemple d’ironie et un exemple qui n’est pas clair mais pourrait être critique

1. Lecture et travail direct sur/avec/dans le texte (voir billet suivant, protégé par mot de passe)

2. 11h00 = Visite au MOA avec cet essai de Montaigne comme guide : l’exposition « Amazonia » (plus tard, à vous de voir les collections permanentes)

3. Retour au texte :

• que soulignerait-on dans l’essai « Des Cannibales » après cette visite ?
• imaginez des ajouts, exemples, « emprunts » supplémentaires (cette idée pourrait s’intégrer dans une dissertation ????)
• le(s) cannibalisme(s) et l’idée de la citation, de « l’emprunt », de « l’entendement » : retour aux métaphores de l’éducation de jeudi dernier (semaine 4)
• une version du texte avec l’ajout de paragraphes, en « cannibalisation » afin d’aider ces premières étapes de votre lecture, consommation consciente, et compréhension :
  Dropbox
  Google Drive
  (Ces textes sont téléchargeables, vous pouvez les utiliser comme vous voulez.)

À propos de cette version mise en paragraphes : notons que presque toute édition et traduction des Essais garde / respecte la forme originelle (cliquez sur les liens entre parenthèses carrées ex. [0084] pour voir le texte de 1595).

Les paragraphes existent à l’époque de Montaigne ; la façon dont il les utilise (ou non / peu) fait partie de son style, c’est un choix délibéré, faisant partie des ses intentions et de l’idée-même d’un “essai” et des “Essais”. C’est à dire : essayer de représenter une seule idée qui se développe pendant tout le long d’un essai … ou vous en donner l’impression. Tout en essayant de représenter la progression de cette pensée elle-même. Le courant de conscience («stream of consciousness») avant la lettre (voir aussi : Marcel Proust, Virginia Woolf, James Joyce, Claude Simon). On vous plonge directement dans le monde (ou : la culture, l’environnement, le milieu) intérieur de la pensée de Montaigne : essayant d’approcher d’un état d’immersion culturelle où nous sommes immergés ou plutôt, plus correctement, nous y sommes submergés (une idée voisine de la réalité augmentée de 2017). Cette visite d’une culture et d’un monde étrange(r) est aussi ce qu’on fait dans cet essai, chez les Tupinambas / Cannibales ; et comme nous avons fait à l’exposition “Amazonia” du MOA.

Rappelons que nous ne sommes que des visiteurs respectueux chez notre hôte, Montaigne : mieux vaut conclure qu’on ait compris une partie d’un Essai (et des Essais en entier), et que cette petite partie nous fasse poser des questions (au texte et à nous-mêmes, le “que sais-je ?” de Montaigne) ; et mieux vaut construire votre propre mini-version d’un Essai, composée des extraits que vous aurez compris et “digérés” et qui vous auront changés ; plutôt que d’essayer de résumer ou de capter “le” sens général, de conquérir et de coloniser. Lire, c’est essayer d’être des cannibales conscients, reconnaissants, humbles ; conscients de nos propres limites, et conscients que nous sommes nous-mêmes des cannibales. Mais : tout en sachant qu’il y a plusieurs façons d’être cannibale ou de cannibaliser. On peut essayer de vivre et de lire en bon cannibale.

Les paragraphes très longs (voire même la longeur d’un essai entier) seraient aussi pour faire travailler le lecteur, avec une lecture en voyage imaginaire et intellectuel, accompagnant Montaigne. Notons que cet Essai-ci, comme les autres, est censé être lu lentement, plusieurs fois, pendant des anées, et—en lecteur idéal—à chaque fois, d’un seul coup ; l’idéal serait de lire pendant plusieurs heures, par exemple dans un hamac au MOA … Cette lecture lente nous approche aussi de l’apprentissage par l’expérience vécue (voir II.6 “De l’exercitation” et I.26 “De l’institution des enfants”). C’est le plus près qu’on puisse s’approcher de la pensée de Montaigne et donc de sa compréhension, qui sont impossibles. Une impossibilité analogue / parallèle : Montaigne et la mort dans “De l’exercitation”. La lecture lente, concentrée, submergée (un « submersive reality » ; voisin de la réalité virtuelle de 2017) donne aussi l’expérience vécue directe de “l’oisiveté”, dont on parlera jeudi et la semaine prochaine …

LIENS SUPPLÉMENTAIRES

• La France antarctique et Villegagnon
• André Thévet, Les singularitez de la France antarctique, autrement nommee Amerique, & de plusieurs terres et isles decouvertes de nostre temps (1557)
• Jean de Léry, L’Histoire d’un voyage faict en la terre du Brésil, autrement dite Amérique (1578)
• Émission / podcast : Jean-Christophe Rufin, « L’aventure française au Brésil au XVIe s. », France Inter 2013-01-23
• cannibalisme – anthropopagie – vampirisme 

LES HAUT-DE-CHAUSSES

= vêtement masculin (breeches en anglais), entre les « bas » ou les « chausses » et le « pourpoint », utilisé en France pendant le Médiéval et l’Ancien régime ; ressemblant souvent à un short, c’est l’ancêtre de la « culotte » (knee-breeches) des « sans-culotte » révolutionnaires et du pantalon du 19e s. (le pantalon a plusieurs histoires différentes ailleurs dans le monde)